Édito

Adultes avant l’heure

Adultes avant l’heure
Les jeunes requérants de 15 à 18 ans ont besoin d’une attention particulière, au vu de leur parcours migratoire traumatisant.(KEYSTONE/Anthony Anex/Photo prétexte)
Accueil

Il y a quelques mois, le Syndicat des services publics adressait une lettre ouverte alarmiste aux autorités genevoises (notre édition du 6 décembre). Il dénonçait les conditions «catastrophiques» d’hébergement et d’encadrement au foyer de l’Etoile – dans le quartier de la Praille – de quelque 120 requérants d’asile mineurs non accompagnés (RMNA). Au menu: manque d’encadrement et de matériel, déscolarisation, enfants laissés sans surveillance la nuit, et même tentatives de suicide.

Mardi, la Cour des comptes a publié ses propres constats. La situation dépeinte est plus nuancée et le ton moins alarmiste. La Cour insiste sur les circonstances atténuantes – une situation de crise –, le dévouement des acteurs de terrain et les efforts entrepris pour améliorer la situation.

Reste au final un tableau indigne. Genève a su héberger tous ces mineurs, mais en les parquant dans un centre d’accueil XXL totalement inadapté. Alors que ces adolescents entre 15 et 18 ans auraient besoin d’une attention particulière au vu de leur parcours migratoire traumatisant ou de ce qu’ils ont fui, Genève ne se conforme même pas au droit international relatif aux enfants, qui impose d’offrir à tout mineur une protection égale. «Ce n’est pas parce que ces jeunes sont des migrants qu’ils doivent subir un encadrement dégradé», s’est exclamé François Paychère, juge de la Cour des comptes.

Alors oui, la tâche des autorités était et reste très compliquée, en particulier pour trouver des terrains où loger les requérants. Mais force est de constater que, malgré les efforts pour améliorer la prise en charge au foyer de l’Etoile, les autorités ne semblent pas avoir pris la mesure du problème. Preuve en est: le futur centre d’Aïre, prévu pour se substituer à l’Etoile, accueillera 80 RMNA et des familles. On passera donc d’un foyer gigantesque à un foyer énorme.

On comprend les contraintes matérielles, les oppositions, le manque de terrain. On relève les efforts entrepris. Mais le problème de base est politique: faute de considérer ces jeunes comme des mineurs d’abord, et seulement ensuite comme des requérants, Genève s’autorisera un encadrement au rabais. A ces adultes avant l’heure, poussés sur le chemin de l’exil, nous devons tout faire pour offrir une véritable seconde chance.

Opinions Édito Rachad Armanios Accueil Requérants mineurs

Autour de l'article

Connexion