On nous écrit

Plumes et paroles persécutées

Nguyên Hoàng Bao Viêt nous remémore que de nombreuses personnes sont persécutées dans le monde en raison de leurs écrits.
Commémoration

Célébrée le 15 novembre 2017, la Journée des écrivains en prison nous rappelé une triste réalité: la situation dégradante de la liberté d’expression et d’opinion dans de nombreux pays. Plusieurs centaines de femmes et d’hommes ont été harcelés, agressés, torturés, emprisonnés, déportés, pris en otage, même tués en toute impunité ou contraints à l’exil à cause de leurs écrits, leurs dessins ou leurs paroles. Et cette année, le Centre PEN Suisse Romand souhaite rendre hommage aux femmes écrivains assassinées ou persécutées partout dans le monde. Parmi tant d’autres cas mentionnés dans la liste non exhaustive publiée par le Comité de défense des écrivains emprisonnés de PEN International, citons pour exemple:

• Anna Politkovskaïa, journaliste russe et défenseuse des droits de l’homme, assassinée le 7 octobre 2006 à Moscou. Très connue pour ses dénonciations des violations des droits de l’homme en Russie et en Tchéchénie.

• Anabel Flores Salazar, journaliste mexicaine, mère d’un bébé de quinze jours et d’un garçon de quatre ans, enlevée le 8 février 2016, dont le corps a été retrouvé le 9 février sur la route Cuacnopalan-Oaxaca dans l’Etat de Puebla, la tête entourée d’un sac plastique.

• Gauri Lankesh, journaliste, éditrice et défenseuse des droits de l’homme indienne, très connue pour ses prises de position en faveur des femmes et contre le système des castes et le racisme. Elle a été assassinée à son domicile de Bangalore le 5 septembre 2017.

• Daphne Caruana Galizia, journaliste et chroniqueuse maltaise, très populaire parce qu’elle était en première ligne depuis des années contre la corruption et les crimes organisés. Elle a été assassinée après que sa voiture ait été piégée le 16 octobre 2017 à Malte.

• Liu Xia, poétesse et artiste chinoise, la veuve de Liu Xiaobo, Nobel de la paix, isolée de force et placée en stricte résidence surveillée dans une localité secrète depuis la mort tragique de son époux en juillet 2017.

• Nguyên Ngoc Nhu Quynh, blogueuse et défenseuse des droits de l’homme vietnamienne, mère d’une fille de onze ans et d’un garçon de cinq ans), condamnée à dix ans de prison en juin 2017 pour «propagande contre l’Etat socialiste».

• Trân Thi Nga, blogueuse et défenseuse des droits de l’homme vietnamienne, mère de deux petites filles de six ans et de quatre ans, condamnée à neuf ans de prison en juillet 2017 pour «propagande contre l’Etat socialiste».

• Dareen Tatour, poétesse palestinienne, arrêtée en octobre 2015 pour son poème publié sur YouTube. En janvier 2017, placée en résidence surveillée en attendant son procès en novembre prochain. Elle encourt 8 années de prison pour ses poèmes «incriminés».

• Pinar Selek, sociologue et écrivaine turque. Elle a été torturée avant l’exil en France. quatre fois condamnée à la prison à vie, quatre fois acquittée. Après vingt ans d’attente, en janvier 2017, le procureur de la Cour de Cassation a demandé une condamnation à perpétuité.

• Asli Erdoğan, poétesse et romancière turque, arrêtée en août 2016 et libérée en décembre 2016. Une liberté conditionnelle, menacée de prison à vie pour ses chroniques dans un journal aujourd’hui interdit.

• Fatima Naout, écrivaine et chroniqueuse égyptienne, condamnée en janvier 2016 à trois ans de prison pour «insulte à l’islam» sur Facebook. Elle regrettait que ses propos aient été mal compris. Elle a plaidé non coupable.

• Razan Zaitouneh, écrivaine, avocate, défenseuse des droits de l’homme syrienne, co-fondatrice du Centre de documentation sur les violations. Enlevée le 9 décembre 2013 en compagnie de ses deux collègues Samira Al-Khali et Nazem Al-Hamadi et son époux Waël Hamada. Depuis lors, on en est sans nouvelles. Les auteurs de l’enlèvement restent inconnus.

• Zehra Doğan, poétesse, journaliste, peintre kurde (Turquie), arrêtée le 24 mars 2017 et condamnée à deux ans et neuf mois de prison. Son crime: «propagande pour une organisation terroriste». Déjà été placée en détention préventive en juillet 2016 avant d’être libérée sous contrôle judiciaire en décembre 2016.

Exprimons donc notre indignation, manifestons notre solidarité avec les gens de plume – femmes et hommes – et les professionnels des médias contre l’ombre des menaces, de la complicité et de la complaisance. Elevons notre voix brisée, pour allumer une bougie, si fragile soit-elle, contre la nuit glaciale de l’indifférence, du silence et de l’oubli.

Nguyên Hoàng Bao Viêt, vice président du Centre PEN Suisse romand, pour le Comité de défense des écrivains et des écrivaines emprisonnés.

 

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