Etonnante légèreté
La position de Charles Spierer à la tête de la Fondation pour les terrains industriels (FTI) est finalement devenue intenable. Le promoteur immobilier semble avoir été rattrapé par ses discrètes activités dans la zone industrielle genevoise. Il entendait à la fois siéger au sein d’une autorité publique, le bras armé de l’Etat dans sa politique foncière et industrielle, tout en continuant à faire des affaires dans ce même secteur.
M. Spierer a démissionné alors qu’un nouveau cas évident de conflit d’intérêts dans une transaction immobilière pointait le bout de son nez. Face à d’autres révélations sur l’incompatibilité de sa fonction à la FTI avec certains de ses mandats professionnels, le conseiller d’Etat Antonio Hodgers plaide aujourd’hui la surprise. Il précise qu’il ne connaissait rien des activités du professionnel de l’immobilier en zone industrielle.
Il est vrai que ce dernier s’était plutôt illustré par le passé dans des opérations liées au logement. M. Spierer était en effet l’un des promoteurs du quartier de la Tulette, à Cologny, soit l’un des plus gros scandales immobiliers de ces dernières années à Genève, mêlant spéculation et propriété par étage. Un signal qui pouvait indiquer qu’il n’avait peut-être pas le profil idéal pour présider une fondation publique. Et si l’on jugeait ses compétences – certainement considérables – comme nécessaires, alors ne fallait-il pas davantage s’assurer que ses différentes casquettes ne soient pas en conflit avec sa fonction publique? La légèreté des autorités a de quoi étonner.
Au Grand Conseil désormais de se saisir du dossier pour définir si d’autres transactions ont posé problème et, surtout, de veiller à durcir les statuts de cette fondation afin de prévenir d’autres cas d’incompatibilité.
La fin soudaine du mandat de Charles Spierer à la FTI ouvre enfin un autre débat. Depuis plusieurs années, la zone industrielle est la cible privilégiée de sociétés immobilières en quête de juteux placements. La spéculation effrénée et la multiplication des structures intermédiaires tendent inexorablement à y augmenter les prix au point de voir certains bâtiments s’échanger à prix d’or. Très loin de la pratique originelle du canton consistant à fournir des terrains bon marché à l’industrie genevoise. Alors que l’un des acteurs de cette politique du profit vient de quitter les commandes, le canton serait bien inspiré de remettre de l’ordre dans ses terrains industriels.