L’Éthiopie est en crise. Quelle crise? L’humiliation nationale ressentie aux JO à cause d’un nageur replet symbole d’un népotisme criard? Ou les dizaines de manifestants tués début août lors d’une brutale répression de la part des forces de l’ordre? Au-delà de ces évènements, qui donnent lieu à une importante couverture médiatique, une crise majeure reste oubliée. Celle de millions de victimes de la sécheresse, une des graves conséquences des changements climatiques, et pour laquelle El Niño joue un rôle central. Après presque deux ans d’absence des pluies saisonnières, ce sont des avalanches d’eau qui se sont abattues d’un coup au cours des mois derniers sur les sols desséchés et ont tout emporté sur leur passage. Les ONG suisses, dont Vétérinaires Sans Frontières (VSF-Suisse), sont au front pour apporter une aide d’urgence avec le soutien de La Chaîne du Bonheur.

Près de 10 millions de personnes, sur une population de 95 millions, ont besoin d’une aide d’urgence. Pourquoi meurt-on encore de faim aujourd’hui en Éthiopie? Plusieurs facteurs concourent à cette tragédie. Il y a bien sûr le fait que les récoltes ne sont pas au niveau prévu, mais une des raisons est liée au mode de vie pastoral, pourtant essentiel dans les basses terres constituant le 60% de la surface du pays. La vie des nomades est soumise actuellement à rude épreuve sous la pression de la sédentarisation et de politiques publiques en matière de santé et d’éducation peu adéquates pour ces populations.

Dès lors, quand une famille de nomade, vivant uniquement de l’élevage de quelques animaux de rente, chèvres, moutons, chameaux notamment, voit ses animaux mourir à cause du manque d’eau et de l’absence de fourrage, elle perd tout: sa nourriture, son maigre revenu et aussi son statut social. Elle est contrainte de rejoindre les cohortes de personnes déplacées, souvent pour des questions de sécurité, regroupées dans des camps dépendants totalement de l’aide internationale. Il y a plus de 777 000 personnes déplacées en Éthiopie aujourd’hui. Elles devraient être 821 000 vers la fin de 2016 selon la DDC (Coopération suisse).

Dans ce cadre, l’aide d’urgence apportée par les organisations non gouvernementales (ONG) est décisive. Les besoins sont immenses: 1,4  milliard de dollars devraient être collectés pour faire face aux besoins des populations dans la détresse. Mais les donateurs institutionnels et les États se font tirer l’oreille, car d’autres crises majeures comme la crise syrienne occupent l’actualité et requièrent aussi des engagements humanitaires massifs.

Une organisation comme VSF-Suisse joue un rôle important en intervenant dans un premier temps pour fournir nourriture pour les familles affamées et du fourrage pour les animaux survivants ainsi que les soins vétérinaires et la formation nécessaires à la reconstitution des troupeaux. D’autres ONG travaillent sur la gestion de l’eau et de la formation en agriculture et le maraîchage, par exemple. Grâce à un appel de La Chaîne du Bonheur en ce mois d’août 2016, la crise éthiopienne sera un peu moins oubliée en Suisse et permettra de venir en aide à des dizaines de milliers de victimes.

Alors que la population éthiopienne subit de plein fouet les effets conjugués des éléments naturels et des violences politiques, ce n’est pas le moment de lâcher prise, mais nous devons garantir au contraire qu’une aide directe et ciblée vers les plus démunis soit urgemment mise en place. Nous sommes convaincus que la population suisse saura être à la hauteur.