«C’est criminel de ne pas apprendre cela à toutes les femmes», conclut une participante à un stage d’autodéfense féministe. Cette phrase est exemplaire de ce que produit l’expérience d’une formation d’autodéfense féministe, car elle est à la fois un appel à la solidarité entre femmes et l’expression d’une révolte légitime.

Il existe plusieurs techniques de défense physique selon les écoles d’autodéfense féministe, mais toutes partent du même souci: l’autodéfense est moins un problème technique qu’une attitude. Dans ces espaces d’entre-soi féminins que sont les cours d’autodéfense, le projet consiste à réfléchir sur les violences faites aux femmes, qu’elles soient verbales ou physiques, et à pouvoir les identifier et construire collectivement des ressources pour y faire face. Mais surtout, il s’agit de prendre conscience de sa valeur afin de se donner le droit de se défendre. Et cela fonctionne. Cette construction collective de sa puissance donne du pouvoir. Pas de superpouvoirs de superhéroïnes, mais la capacité de penser la violence à laquelle nous sommes confrontées comme une expérience largement partagée par d’autres personnes. Cette conception collective est source de légitimité et de force et veut permettre la mobilisation de ses ressources dans une situation de violence, ce qui est capital pour faire face à des violences qui sont le fait, dans l’écrasante majorité des cas, de proches de la victime.

Contre la psychologisation et l’individualisation qui caractérisent les approches dominantes des violences interpersonnelles, le féminisme offre une conception collective et politique que l’autodéfense féministe met en œuvre de façon convaincante. Loin d’être une simple stratégie de défense, celle-ci comprend également des propositions quasi révolutionnaires pour l’ordre patriarcal, en encourageant les femmes à se réapproprier leur droit à se défendre et les moyens pour le faire. Cette expérience radicale de prise de pouvoir montre également combien émancipation collective et individuelle sont liées.