On nous écrit

Ce n’est jamais le bon moment!

A la suite de la lettre d’Ana Barciela publiée le 24 mai 2022 concernant le manque de personnel soignant et ses conséquences, Claire Miorini adresse ce message.
Santé

Chère collègue, merci d’avoir eu le courage de décrire la réalité que tu as vécue, ainsi que nombre d’entre nous, concernant les conditions de travail sur le terrain causées par le manque chronique de personnel paramédical. Ce cercle vicieux: manque de personnel entraînant le stress du personnel actif continuant à soigner le mieux possible, entraînant des maladies, de l’absentéisme, et l’abandon de la profession par découragement, ne semble pas avoir d’écho au niveau politique et hiérarchique.

Je te rejoins à ce sujet, car tu as soulevé un problème de santé publique récurrent.

La professionnalisation des soins a succédé à une longue période de sœurs protestantes et catholiques très compétentes et corvéables à merci. Voici un exemple parmi tant d’autres: lors d’un de mes stages de formation à l’Hôpital Cantonal de Lausanne (ancêtre du CHUV), mes formatrices m’ont montré les chambrettes attenantes aux salles de malade de 10 lits dans lesquelles les sœurs dormaient après leur journée de travail et répondaient aux appels des patients la nuit.

Actuellement, les infirmières ont une vie privée, mais peut-être reste-t-il dans l’imaginaire commun un reste d’idée que nous sommes aussi solides que nos aïeules!?

J’espère que ton plaidoyer sera entendu sur le fond et que tu n’auras pas d’ennuis suite à ton courrier. En effet, c’est par peur des conséquences que nombre d’entre nous n’ont pas ton courage, moi y compris.

Le futur me semble sombre: l’initiative pour des soins infirmiers forts, approuvée par une grande majorité de la population, est tombée dans un profond tiroir. A part l’effort fait par nos autorités et employeurs pour intensifier le recrutement et la formation d’étudiants, personne ne parle d’améliorer les conditions de travail des infirmières épuisées pour qu’elles restent dans la profession et ne s’enfuient pas en courant! «Ce n’est pas le moment, mais on y réfléchit» ai-je entendu tout au long de ma carrière.

Devrons-nous attendre aussi longtemps que pour l’assurance maternité, ou aussi en vain que pour l’égalité homme-femme?

Actuellement, vu les résultats des dernières votations concernant l’AVS des femmes et l’annonce de la future augmentation des primes des assurances maladies, ce n’est toujours pas le moment!

Claire Miorini,
ex-infirmière en soins généraux, ex-infirmière-instrumentiste, et ex-infirmière de la santé publique, Genève

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