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Berlin lance des aides massives

L’Allemagne a débloqué 65 milliards d’euros pour soutenir le pouvoir d’achat.
Berlin lance des aides massives
Le ministre des Finances Christian Lindner et le chancelier Olaf Scholz ont annoncé un nouveau plan d'aide aux ménages. KEYSTONE
Allemagne

Berlin va débloquer 65 milliards d’euros pour alléger la facture énergétique qui pèse sur les particuliers et les entreprises. «C’est deux fois plus que les deux premiers trains de mesures d’environ 30 milliards d’euros ensemble», a souligné hier le chancelier Olaf Scholz qui, après une nuit de négociation, a détaillé les mesures en présence des chefs des trois partis de la coalition gouvernementale.

Sans nier les discussions difficiles au sein de la coalition, le chancelier et ses alliés ont tout fait pour présenter un front calme et uni à un moment où la Russie de Poutine utilise l’arme énergétique pour faire monter les prix du gaz, déstabiliser les économies et diviser les sociétés d’Europe de l’ouest. Entre autres, avec l’espoir de provoquer des mouvements sociaux similaires aux manifestations qui se sont déroulées ce week-end à Prague.

Cinq terminaux à créer

Pédagogique, le chancelier a d’abord assuré que l’Allemagne «pourra faire face à cet hiver» malgré une Russie «qui ne respecte plus les contrats» et a cessé de livrer. Il a évoqué la construction de cinq terminaux pour l’importation de gaz liquéfié, la mobilisation des centrales à charbon de réserve, les économies d’énergie et des réservoirs de gaz désormais pleins à près de 85%.

«Nous allons rapidement mettre en œuvre la plus grande réforme de l’allocation logement jamais faite» Olaf Scholz

Le ministre des Finances Christian Lindner a aussi évoqué la décision à venir quant à la prolongation de l’activité de deux ou trois centrales nucléaires. «Ceci ne règle cependant pas le problème de l’explosion des prix et des factures de plus en plus élevés qui pèsent sur les foyers qui ne gagnent pas beaucoup», a reconnu le chancelier. La montée délirante des prix du gaz a déjà atteint les ménages sous la forme d’une forte inflation (7,9% en août) qui se lit notamment dans le prix des denrées alimentaires (+ 14,8%). Mais la pression va encore monter d’un cran en octobre prochain.

«Au 1er octobre, les Allemands vont devoir s’acquitter d’une taxe spéciale pour soutenir les gros fournisseurs de gaz allemands dont certains sont au bord de la faillite», précise Sven Schob, conseiller énergétique chez Caritas Berlin et qui passe ses journées à expliquer aux foyers modestes comment économiser l’énergie. Par ailleurs, la nouvelle loi prévoit que les hausses des prix de l’énergie pourront être répercutées dès le mois prochain.

«Le pire, ce sera en 2023 quand le rappel des charges 2022 va tomber. Les plus pauvres, qui habitent souvent dans les immeubles les moins bien isolés, vont recevoir des rappels de 1000 ou 2000 euros. Je ne sais pas comment ils vont faire», redoute Sven Schob.

Allocations augmentées

Pour éviter une dérive, le gouvernement a donc présenté hier un ensemble de mesures sociales qui doivent tenir sur le long terme: «Nous allons rapidement mettre en œuvre la plus grande réforme de l’allocation logement jamais faite. Elle intégrera une composante chauffage stable et importante. Le nombre de bénéficiaires passera de 700 000 foyers aujourd’hui à environ 2 millions», a annoncé Olaf Scholz.

Le revenu d’existence minimum appelé Hartz IV deviendra «l’allocation citoyenne» (Bürgergeld) et sera aussi revalorisé dans le même esprit. Les allocations familiales seront augmentées et les étudiants et retraités toucheront des chèques respectivement de de 200 et 300 euros. Enfin, les entreprises pourront verser jusqu’à 3000 euros non soumis à charges à leurs salariés pour compenser l’inflation.

Pour financer une partie de ces mesures, mais aussi pour agir sur l’origine du problème et faire baisser les prix du gaz, le Gouvernement allemand a aussi décidé de s’attaquer à la «spéculation» sur le marché de l’énergie et aux bénéfices exceptionnels réalisés par des producteurs qui «profitent» de prix du gaz record, selon les mots du chancelier. Cette approche est aussi en discussion actuellement à Bruxelles au niveau de l’UE et pourrait prendre la forme d’une contribution obligatoire pour les entreprises du secteur énergétique.

Subvention des prix

L’argent dégagé, au moins 25 milliards d’euros estime M. Lindner, servira à subventionner une partie des prix du courant et du gaz consommés par les particuliers et les petites entreprises. L’argent serait de même utilisé pour faire baisser le niveau de la redevance sur les réseaux, partie intégrante mais peu visible de la facture d’électricité.

Enfin, l’augmentation de la taxe sur la tonne de CO2 prévue pour les entreprises en 2022, sera reportée à 2023. Si Bruxelles ne s’accorde pas rapidement sur cette «contribution sur les bénéfices», Berlin est prêt à faire cavalier seul.

International Thomas Schnee Allemagne

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