On nous écrit

Ça va trop loin

Hugues Poltier commente le message du Conseil fédéral sur l’initiative «Non à l’élevage intensif».
Initiative

A la lecture du compte-rendu de la conférence de presse d’Alain Berset annonçant le rejet par le Conseil fédéral de l’initiative «Non à l’élevage intensif», la surprise est totale: le CF la «rejette» au motif «qu’elle va trop loin». Ah ça, pour une surprise…

En fait, on croirait (re)lire un copier-coller d’un précédent message du CF à une précédente initiative formulant une demande dont l’exécution aurait un coût pour l’économie. Le «va trop loin» fait de plus en plus figure de «ritournelle du CF»… on pourrait imaginer une chanson: Mesdames et Messieurs, la dernière ritournelle du CF! Financée avec l’aimable soutien d’Economie Suisse, de l’USAM et autres ASB. Tatatam..

Bon, ben … nous prennent pour des cons, quoi! Normal, on vote pour eux, hein! Chuchote le cynique derrière moi…

Récapitulons. Le CF, à majorité de droite, élu par une Assemblée nationale à près de 2/3 à droite, présente fatalement des projets de loi massivement de droite (les lois de révision AVS, pour mémoire…) et, à chaque initiative émanant de la société civile «de gauche», nous ressort le refrain du «va trop loin».

Ce que ça veut dire dans une langue moins de bois: les «milieux économiques» ont dit niet; cette info a été transmise sans fioriture en voie directe au gouvernement, donc, nous CF, les gentils fondés de pouvoir de ces dits milieux, disons niet à notre tour (en fait, nous nous contentons de reprendre le niet en provenance de ces milieux, mais chut, faut pas, trop, le dire…); en y mettant à peine plus les formes. En disant, justement, en substance: «ça va trop loin». Trop loin? Mais où ça trop loin? Eh bien, trop, trop loin. Nous voilà éclairés…

En tout cas sur ceci: les «milieux économiques» ne se soucient que de leurs profits; car prendre soin des animaux dans les élevages signifierait des coûts plus élevés, donc soit des profits diminués soit un coup de massue pour les consommateurs·trices. L’un et l’autre étant «insupportables» pour l’électorat des partis au pouvoir (selon leurs directions, bien entendu), le CF, sagement (il sait bien d’où provient «son» «autorité») fait passer ledit niet … ici par la voix d’un de ses représentants socialistes (dont l’argumentaire se différencie d’un LR ou d’un UDC comme un de mes cheveux d’un de ses voisins. Ah oui, au fait, j’ai oublié, c’est supposé servir à quoi des socialistes dans les gouvernements?

En gros, la santé animale, sa qualité de vie, on s’en tape; la qualité nutritive de ce qu’on bouffe, itou. «On», ici, c’est le populo. Les «milieux économiques», eux, (leurs dirigeants en tout cas), mangent que du nec plus ultra sorti de fermes bio, patati patata. Que les pauvres bouffent de la merde tout en gonflant les bénéfices des «milieux dirigeants», c’est ça le normal, n’est-ce pas?

En tout cas, en matière de foutage de gueule, cette conférence de presse, elle a fait dans le dur …

Et on appelle ça comment déjà? Ah, oui, l’exercice démocratique du pouvoir: on a décidé, ferme ta gueule.

Hugues Poltier,
Lausanne

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