Suisse

Sur la route, prêts à se faire arrêter

Exigeant des actions du Conseil fédéral, Extinction Rebellion lance une action de blocage pacifique à Zurich.
Sur la route, prêts à se faire arrêter
Les militants qui sont restés assis sur la chaussée savaient qu’ils allaient se faire arrêter. KEYSTONE
Climat

Les actions étaient annoncées de longue date: pour sensibiliser à la nécessité d’agir pour le climat, des membres du mouvement Extinction Rebellion ont bloqué ce lundi un tronçon de rue pendant plusieurs heures au centre de Zurich, dans une ambiance festive et pacifique. La police a interpellé 134 personnes. «Nous reviendrons ce mardi», a clamé le mouvement, qui ne veut pas lâcher Zurich avant d’avoir obtenu des réponses du Conseil fédéral.

Extinction Rebellion a choisi Zurich, «car nous voulons bloquer la capitale économique du pays pour sensibiliser le public», explique une militante désirant rester anonyme, qui vient de sortir d’un groupe d’environ 200 personnes assises sur le bitume. Un tronçon de la rue Urania, entre la Limmat et la Bahnhofstrasse, à 300 m de la gare principale, est bloqué. C’est là que les protestataires se sont finalement tous réunis, vers 13 heures. On entend une majorité de francophones. «Nous n’avons pas encore réussi à mobiliser suffisamment en Suisse alémanique, peut-être plus réticente à la désobéissance civile», note Valérie D’Acremont, cofondatrice des Doctors for XR, médecin spécialiste de santé globale et professeure d’université.

Forte présence policière

«Ceux qui restent assis sont prêts à se faire arrêter, ce n’est pas mon cas», poursuit la militante anonyme. «En distribuant des tracts aux passants et en leur expliquant pourquoi il faut agir maintenant, je suis plus utile ici que là-bas», ajoute James, un retraité argovien d’origine anglaise. «Là-bas»: à quelques dizaines de mètres, des manifestants de tous âges, assis sur des chaises pliables ou en train de danser, attendent leur arrestation. Quand les policiers les soulèvent, le public applaudit.

Plusieurs retraités ont manifesté ce lundi. KEYSTONE
 

«Regarde, ça c’est la Suisse», dit un jeune anglophone en passant, sans s’arrêter. «Il y a une énorme quantité de policiers pour très peu de manifestants.» Un autre passant applaudit: «La protection du climat, je suis pour.» Est-ce qu’il irait s’asseoir et accepterait une condamnation? «Mmmh…» hésite le quinquagénaire. «Je viens de commencer à manifester, la première fois à Uster contre les mesures Covid. Je suis probablement le seul à être contre ces mesures et pour le climat!»

«Nous n’avons pas encore réussi à mobiliser suffisamment en Suisse alémanique» Valérie D’Acremont

L’ambiance est bon enfant. Des gens chantent. Extinction Rebellion s’est doté de personnes de contact avec la police, dont la fonction est clairement indiquée sur leur gilet. La police dispose d’une «équipe de dialogue». Celle-ci laisse donc un petit groupe mimer les vagues de l’océan sur le trottoir. «La police est bien mieux préparée qu’en juin dernier, où nous avions bloqué un pont. Elle avait, alors, été très agressive», dit une autre manifestante.

De nombreuses personnes ont pris congé pour être là. C’est le cas de Valérie D’Acremont. A ses yeux, quelle que soit l’issue avec la police, la manifestation est un succès. «Notre expérience montre que l’événement a un impact, explique-t-elle. Il y a déjà eu un changement de discours au sein de tous les partis concernant le climat. Et Extinction Rebellion n’est plus perçu comme un mouvement extrême. Maintenant, le public a réalisé que nous sommes des citoyens de toutes sortes, y compris des universitaires, des soignants, des enseignants, des familles, qui ont compris la gravité du problème.»

Blocage renouvelé

A Zurich, le mouvement dit vouloir renouveler le blocage tous les jours jusqu’à ce que le Conseil fédéral réponde à ses trois revendications, soit «dire la vérité» sur l’urgence climatique, «agir maintenant» et «convoquer des assemblées citoyennes». Anaïs Tilquin, une porte-parole du mouvement, se félicite du nombre de personnes «prêtes à se faire arrêter. Dans la désobéissance civile, explique-t-elle, il faut un élément de perturbation du public pour attirer l’attention sur le problème, mais aussi une part de sacrifice.» Le nombre de retraités assis en attendant de se faire déloger par la police – qui a finalement complètement libéré la chaussée à 17 heures – est frappant. «Ils nous disent qu’ils n’ont rien à perdre et préfèrent que ce soit eux en prison plutôt que leurs enfants», souligne Anaïs Tilquin.

Robert Soós, porte-parole de la municipale Karin Rykart (verts), en charge de la Police, rappelle que la manifestation n’était pas autorisée, «même si le département avait fait une offre généreuse à Extinction Rebellion, refusée». Anaïs Tilquin rétorque: «Nous ne sommes pas allés négocier avec la police, mais leur expliquer ce que nous voulions faire. Une autorisation aurait dû couvrir tout le centre-ville sans limite de temps. Nous ne pouvions accepter les quelques heures proposées à des endroits qui ne nous convenaient pas.»

En fin d’après-midi, la police a communiqué que 134 personnes avaient été emmenées au poste pour un contrôle. Des décisions d’éloignement de 24 heures ont également été prononcées. Ce qui, pour Anaïs Tilquin, «n’est pas un problème et permet de recommencer mardi». LA LIBERTÉ

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