Édito

Décarboner l’Europe. Et la Suisse ?

Décarboner l'Europe et la Suisse ?
Ambitieux, ce «pacte vert» ne va toutefois pas assez loin, estiment nombre d’associations et représentant•es des partis écologistes. KEYSTONE

Vu de Suisse, le «Green New Deal» présenté mercredi par la Commission européenne constitue une avancée majeure pour le climat. Surtout depuis qu’une courte majorité de nos compatriotes a refusé une Loi CO2 minimaliste, à défaut d’être vraiment consensuelle. Le plan européen prévoit, entre autres mesures, de taxer le kérosène, d’en finir avec les permis de polluer gratuits et la vente de voitures neuves à moteur essence, diesel ou hybrides, ou encore d’instaurer des taxes à l’importation dans les secteurs les plus polluants (acier, aluminium, ciment, engrais et électricité). Ces propositions devraient permettre, d’ici 2030, de réduire de 55% les émissions de gaz à effet de serre dans l’Union européenne par rapport à 1990 et de faire de l’Europe le premier continent à parvenir à la «neutralité climatique» d’ici à 2050.

Ambitieux, ce «pacte vert» ne va toutefois pas assez loin, estiment nombre d’associations et représentant•es des partis écologistes. Il est jugé trop timoré dans les objectifs poursuivis. D’autant qu’il devra passer à la moulinette des eurodéputé•es et des vingt-sept Etats membres. Sans parler du bras de fer à venir avec les secteurs économiques les plus polluants. Le risque existe de faire passer à la caisse les revenus les plus modestes, et de voir resurgir des Gilets jaunes dans toute l’Europe, et ce malgré la mise sur pied d’un fonds social.

Enfin, les douze mesures présentées émanent d’une commission européenne ultralibérale qui ne remet nullement en cause la croissance ou les traités de libre-échange. Elles reposent, pour une large part, sur la croyance que l’augmentation du prix du carbone permettra de modifier en profondeur les comportements. Or, si le marché peut se transformer, à l’instar du secteur automobile, la seule incitation ne permettra pas de réduire drastiquement la consommation des plus riches et des plus gros émetteurs de carbone.

Reste que ce plan a le mérite de fixer un cap. S’il créera des emplois, il nécessitera aussi passablement d’argent public. Et c’est possible. La crise covid que nous traversons depuis plus d’un an n’a-t-elle pas montré que les Etats étaient capables de dépenser des milliards pour sauver l’économie et l’emploi? Puisse la Suisse prendre le train en marche – avant d’y être contrainte et forcée – et profiter de la dynamique européenne pour relancer au plus vite un arsenal législatif visant à réduire les gaz à effet de serre dans notre pays. Le temps de ces derniers jours nous rappelle, si besoin est, qu’il y a urgence.

Opinions Édito Christiane Pasteur

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