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«Seul un cumul de mesures pourra enrayer la pandémie»

Plusieurs recherches menées en Chine ou en Corée du Sud préconisent des mesures sanitaires très rigoureuses pour lutter contre la propagation fulgurante du Covid-19. Une dernière étude va plus loin, et recommande le cumul de mesures strictes… avant qu’il ne soit trop tard.

Les médias américains en parlent comme de l’une des études qui embarrassent le plus l’entourage du président Donald Trump. Elle est parue dans la revue scientifique The Lancet, le 23 mars 2020. Basée sur le cas de Singapour, avec des modélisations chiffrées, cette étude conclut que seule la combinaison de plusieurs mesures sanitaires très rigoureuses permettra de ralentir plus rapidement la progression du Covid-19, dans sa première phase d’expansion. En clair: opter pour des mesures de confinement partiel – comme aux Etats-Unis ou en Suisse – est insuffisant. Même le confinement strict ne devient efficace que s’il est associé à d’autres mesures, strictes elles aussi: mise en télétravail maximale, tests de dépistage massifs, effectués le plus tôt possible; repérage et isolement précoce de toutes les personnes infectées, avec mise en quarantaine immédiate des membres de leur famille.

Originalité de cette étude réalisée par le département de santé publique de l’Université de Singapour: les auteurs la présentent comme la première à analyser le cumul des mesures sanitaires, et leur efficacité suivant différents scénarios. Ils espèrent que leurs résultats aideront les décideurs politiques au niveau international à mettre en place au plus vite les mesures appropriées. Ils insistent sur la nécessité absolue d’agir dès le début des signes d’infection – et non pas une fois la propagation déjà répandue. Plus les gouvernements hésitent ou attendent, plus ces mesures cumulées seront difficiles à mettre en œuvre, leur suivi compliqué, leur contrôle ingérable, les infrastructures et ressources nécessaires insuffisantes pour traiter tous les malades.

En France, les perspectives du manque de lits, de masques, de respirateurs disponibles sont déjà au cœur de la polémique. Se pose maintenant la question de la disponibilité des réactifs nécessaires aux tests de dépistage. C’est ce que souligne Antoine Flahaut, professeur de santé publique à l’Université de Genève, et directeur de l’Institut de santé globale, dans une interview pour l’AFP. Son message reste toutefois moins alarmiste que celui de l’OMS, qui réclame le dépistage systématique d’urgence. En refusant d’appliquer dès les premiers signes de la pandémie un ensemble de mesures de confinement strictes, «les autorités suisses ont fait passer les intérêts économiques avant la santé de la population. C’est scandaleux!», s’indigne en Suisse romande un chercheur universitaire, proche de centres de santé. Des pétitions sont en ligne, exigeant elles aussi «le dépistage obligatoire et gratuit en Suisse du coronavirus». Contacté hier, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) n’a pas encore répondu à nos questions.

Au 29 mars dernier, les données de l’OMS pour Singapour ne signalaient que 802 cas et deux morts, sur une population de plus de 6 millions d’habitants, pourtant fortement liée aux échanges internationaux et à l’immigration, et vivant sur un territoire exigu à très haute densité. A cette même date, les Etats-Unis, un des derniers pays à avoir été touché par la pandémie, sont passés en tête de liste au niveau mondial, avec 103’321 cas et déjà 1668 morts. LA LIBERTÉ

Autre Gilles Labarthe

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