Édito

Le trading comme un boomerang

Le trading comme un boomerang
Quatre occupations simultanées et pas des moindres: les militants d’Extinction Rebellion (XR) ont frap-pé fort lundi à Genève et à Lausanne. JPDS
Désobéissance 

Quatre occupations simultanées et pas des moindres: les militants d’Extinction Rebellion (XR) ont frappé fort lundi à Genève et à Lausanne en investissant les sièges de Vitol, Cargill, Mercuria et Ifchor pour souligner l’impact de leur business sur le changement climatique. Pacifique, symbolique, l’opération, bien qu’un peu brouillonne, est des plus redoutables, tant ces sociétés détestent la lumière. Les rouages de la machine productiviste mondialisée ne devraient jamais transparaître derrière les rutilants étals de nos supermarchés ou les publicités alléchantes.

Or, à l’abri des quelques façades anonymes pointées lundi par XR, des brokers achètent, vendent et font circuler chaque jour pétrole, produits agricoles et autres matières premières pour des milliards de francs. Un casino planétaire qui en détermine les prix, la localisation et les méthodes d’extraction dans la plus grande opacité et, avec pour seule boussole, leur profit. Et tant pis pour les déforestations, l’exploitation de travailleurs sans protection, la croissance exponentielle du fret maritime, la souveraineté introuvable des Etats. Rien d’illégal, a priori, mais à l’heure où la planète file vers la catastrophe écologique et sociale, il est bon de savoir comment et par qui celle-ci est orchestrée.

Dans le paisible arc lémanique, loin des méfaits de l’extractivisme à outrance, ces acteurs majeurs des commodities pouvaient jusqu’à peu opérer en toute discrétion, sans lois contraignantes, contre un modeste écot fiscal. Avec quelque mécénat et une poignée d’emplois, ce petit ruissellement devait garantir la stabilité du deal.

Mais certains commencent à voir la trajectoire du boomerang. Si la Suisse ne connaît pas les famines de la spéculation céréalière, les ruptures de barrages miniers, les villages empoisonnés par les hydrocarbures ou vidés de leurs habitants par la palme à huile, elle souffre et souffrira de plus en plus du dérèglement de l’écosystème planétaire.

En première ligne, les militants d’Extinction Rebellion disent vouloir secouer les consciences. Mais c’est surtout notre rationalité et notre instinct de survie qui nous demandent d’ouvrir les yeux et de cesser d’être complices de ces entreprises. Refuser d’être des rouages de notre propre anéantissement.

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