Édito

L’Italie moins «rouge»?

L'Italie moins «rouge»?
Une victoire de la Lega en Emilie-Romagne affaiblirait la coalition réunie autour du premier ministre Giuseppe Conte. Salvini le sait très bien et met toute son énergie dans la campagne de ces élections régionales. KEYSTONE
Italie

Fin janvier, l’Emilie-Romagne pourrait passer du rouge au vert. Pas celui qui progresse dans le reste de l’Europe, urgence écologique oblige, mais celui tendance brune de la Lega, le parti d’extrême droite de l’ancien ministre de l’Intérieur Matteo Salvini. Une véritable révolution pour cette région gouvernée à gauche depuis 1970, longtemps bastion communiste – c’est ici que se trouve Brescello, village où Giovannino Guareschi a situé les mythiques algarades entre Don Camillo et Peppone.

La majorité progressiste en Emilie-Romagne est d’ores et déjà pâlotte, avec un président de la région issu de l’aile centriste du parti démocrate (PD), Stefano Bonaccini. C’est lui qui risque son poste le 26 janvier, face à la candidate leguiste Lucia Borgonzoni, soutenue par l’essentiel de la droite. Pour l’instant, le Movimento 5 Stelle (M5S, antisystème) n’a pas encore donné de consignes de vote. Jusqu’il y a peu, il gouvernait l’Italie avec la Lega, avant de faire aujourd’hui ménage commun avec le PD. La logique voudrait qu’il soutienne ce dernier.

Aussi parce qu’une victoire de la Lega affaiblirait la coalition réunie autour du premier ministre Giuseppe Conte. Salvini le sait très bien et met toute son énergie dans la campagne de ces régionales, où seront par ailleurs élus 51 conseillers. En baisse dans les sondages après sa sortie du gouvernement précédent – et l’échec de sa manœuvre pour retourner aux urnes –, le Lombard a repris du poil de la bête. En particulier après le triomphe de son parti en Ombrie, fin octobre, petite région penchant elle aussi à gauche depuis une cinquantaine d’années. PD et M5S avaient présenté une candidature commune, qui a largement échoué, expliquant les atermoiement du M5S pour le prochain scrutin.

Salvini a quelque peu modéré son discours, alors qu’il avait multiplié jusqu’à l’été les références à Mussolini et au ventennio fasciste. Il tente aussi un rapprochement avec l’Eglise, par le biais de signes extérieurs de religiosité qu’on ne lui connaissait pas – de soudaines envies d’embrasser un rosaire, par exemple –, ou par une récente entrevue avec le cardinal Ruini. Tenant de l’orthodoxie doctrinale, l’octogénaire est une figure importante de l’aile conservatrice opposée au pape François. Son prénom est Camillo mais il ne vient pas de Brescello.

Dans la foulée de l’Emilie-Romagne, ce sont sept autres régions qui renouvelleront leurs conseils régionaux et présidents d’ici à juin, dont cinq tenues par le PD (Calabre, Campanie, Marche, Pouilles et Toscane). Or pour en conserver le plus possible, les seules actions locales ne suffiront pas: c’est par une politique nationale progressiste et clairement démarquée de l’extrême droite que le parti démocrate pourra signifier sa différence. Et survivre, à terme.

Opinions International Édito Samuel Schellenberg Italie

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