Édito

Dérapage calculé

Dérapage calculé
Des policiers français évacuent un migrant durant la vaste opération du jeudi 7 novembre. KEYSTONE
France

Et à présent, les migrants. En France, après le démantèlement du droit du travail, la répression policière des gilets jaunes ou des écologistes, la privatisation de sociétés publiques comme la Française des jeux ou l’économie de 3,4 milliards d’euros d’ici à fin 2021 sur le dos des chômeurs, voici venu les annonces droitières du gouvernement Macron concernant l’immigration.

Edouard Philippe a dévoilé un plan destiné à «reprendre le contrôle», dans un alignement d’éléments rhétoriques qui siéraient plutôt au Rassemblement national (ex-FN). Deux mesures, en particulier, inquiètent les milieux de défense des étrangers – les «droits-de-l’hommistes», ainsi que les qualifie le président français dans une longue interview accordée à Valeurs Actuelles, journal d’extrême droite. Les quotas migratoires, calculés en fonction de certains besoins économiques. Et un délai de carence sur l’aide médicale. Les requérants d’asile n’auront droit qu’à des soins d’urgence durant les trois premiers mois sur le territoire français. Une telle disposition serait contraire au droit européen qui exige une assistance médicale pour les plus vulnérables et à tout le moins la garantie du traitement de maladies et troubles mentaux graves, au-delà des cas d’urgence vitale.

Elle est belle, la France du président élu «pour faire barrage à Marine le Pen». Sous pression populaire, voyant que la contestation face à ses réformes ultralibérales tient bon, il ne reste plus que le chiffon rouge xénophobe à agiter pour faire diversion sur les échecs d’un pays où les inégalités se creusent de mois en mois. Tandis que la pauvreté stagne, voire explose, dans des régions comme l’Ile-de-France, selon les observations de la Fondation Abbé-Pierre, les rémunérations des patrons du CAC 40 atteignent des records (5,8 millions par an en moyenne en 2018, soit une hausse de 12% par rapport à 2017 et équivalant à 240 fois le salaire minimum français).

La misère se combat-elle par la xénophobie? Rejeter la faute sur les personnes migrantes ne fait que préparer le terrain pour l’extrême droite, qui se frotte les mains à l’idée des prochaines élections municipales. Et a tout à gagner de ces surenchères oratoires, portées par ses émissaires médiatiques, les Eric Zemmour, Alain Finkielkraut ou autres Robert Ménard. Surenchères xénophobes et liberticides qui, couplées aux politiques ultralibérales inhumaines, dessinent une bien sombre perspective dans la patrie des libertés, de l’égalité et la fraternité.

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