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Les enfants méritent une attention particulière

À votre santé!

Le 29 août dernier, la conférence annuelle de la Société de santé publique suisse (SPS) a adopté un «Manifeste sur la santé des enfants et des adolescents». Le texte, cosigné par de nombreuses sociétés ou associations en lien avec les enfants, dont la Société suisse de pédiatrie (SSP), fait écho aux recommandations émises dans le document de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) intitulé «Investir dans l’enfance: la stratégie européenne pour la santé des enfants et des adolescents 2015-2020».

Ce manifeste rappelle que l’enfance et l’adolescence présentent de grandes opportunités pour la santé de la population. Dans aucune autre étape de la vie, la promotion de la santé et la prévention ne sont aussi efficaces, durables et économiquement avantageuses que durant ces premiers épisodes. En Suisse, ce grand potentiel n’est que trop peu utilisé. Rappelons qu’en 2016 seules 2,3% des dépenses de santé par personne ont été consacrées à la prévention, alors que la moyenne de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) est de 2,9%. En comparaison, les coûts pour les traitements stationnaires et ambulatoires et pour les médicaments représentent 90%.

Le manifeste de la SPS comprend six exigences centrales, qui se veulent transversales et ne touchent pas uniquement l’approche biomédicale.
La première de ces exigences est que la Confédération et les cantons élaborent une stratégie globale pour la santé des enfants et des adolescents et améliorent la collecte de données nationales sur la santé de ces populations. En effet, les données sont encore trop souvent parcellaires, parfois cantonales, voire communales, et malheureusement pas toujours comparables.

Le manifeste insiste par ailleurs sur l’importance du rôle joué par la petite enfance sur la santé tout au long de la vie, et donc de la détection précoce des problèmes, qui pourront être mieux accompagnés, et de manière plus efficace, s’ils sont détectés à cet âge de la vie. Il relève aussi que la santé des enfants dépend notamment d’une hausse du subventionnement de l’accueil extrafamilial et du soutien des familles socialement défavorisées et/ou cumulant les difficultés.

De plus, un congé parental réglementé par la loi est nécessaire pour les deux parents, bien au-delà des deux semaines de congé-paternité votées au Parlement la semaine dernière – même si c’est un pas dans le bon sens. Le congé parental aiderait les deux parents à construire un attachement solide – tellement nécessaire – avec leur enfant sans affecter leur carrière professionnelle.

Le manifeste rappelle aussi combien la scolarité est marquante pour la vie entière et joue un rôle-clé dans la promotion de la santé. Il est désormais prouvé – et c’est heureusement souvent le cas – qu’un bon climat scolaire y contribue. Le lien entre les parents et l’école est essentiel et doit être nourri.

Le texte insiste également sur l’attention à apporter à la transition école-métier. En effet, comme la petite enfance, l’adolescence est une phase de sensibilité et de vulnérabilité accrues, et le «décrochage» scolaire ou professionnel touche près d’un jeune sur dix. Les offres de conseil et de soutien doivent être d’un accès facile et à bas seuil. De plus, elles doivent respecter l’autonomie et la sphère privée des adolescents en fonction de leur âge. La protection des enfants et des adolescents, notamment la prévention contre le tabagisme et l’alcoolisme, est en outre cruciale, tout comme celle de la consommation de cannabis.

De manière générale, le document insiste beaucoup sur la prévention et la détection précoce des troubles psychiques. Sans doute sa partie la plus novatrice est celle qui traite du rôle essentiel joué au niveau communal. Cette section rappelle que l’organisation politique de la commune, ses objectifs et ses processus de planification ont une influence essentielle sur la qualité de vie et la santé des enfants et des adolescents. Cela s’exprime par exemple dans l’aménagement des différents espaces sociaux tels que les écoles, les aires de jeu et de récréation, les chemins vers l’école et les routes, les lieux de rencontre du quartier et des jeunes, mais également dans l’offre destinée aux familles, en particulier celles socialement défavorisées.

Au fond, ce manifeste est un rappel que l’enfant, qui n’est pas toujours bien défendu, doit avoir une place centrale dans les discussions politiques et que, trop souvent, les moyens pour l’accompagner dans ce long chemin vers l’âge adulte font défaut. Rappelons-nous que les enfants dessineront le monde de demain.

L’auteur est pédiatre FMH et membre du comité E-Changer, ONG suisse romande de coopération.

Opinions Chroniques Bernard Borel

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lundi 8 janvier 2018

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