Édito

Océania en Helvétie

Océania en Helvétie
KEYSTONE/PHOTO PRÉTEXTE
Protection des données

Dossiers électroniques des patients mal protégés, logiciels espions utilisés par l’Etat sans base légale, empreinte vocale de millions de clients de Postfinance automatiquement relevée… Les lauréats du prix «Big Brother awards», remis la semaine dernière, ont effectivement tous un petit arrière-goût orwellien. Si, en Suisse, le monde politique et des entreprises s’accorde à clamer publiquement son amour de la protection des données, force est de constater que la population est surveillée, ses faits et gestes disséqués, enregistrés, exposés au piratage.

A l’ère du règne des GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon et autres géants du web), la tentation du fatalisme face à ce genre de nouvelles est grande. Après tout, s’ils savent déjà tout de nous, que peut-on bien y faire? Le fait que des collectifs s’unissent pour remettre ces «Big Brother awards» nous montre une autre voie, celle de la contestation de normes qui ne respectent pas nos droits fondamentaux et la protection de nos données. Quel besoin Postfinance a-t-il d’enregistrer 2,9 millions de signatures vocales de citoyens? Les informations relatives à notre santé sont extrêmement précieuses et sensibles, pourquoi n’ont-elles pas droit à un cryptage des plus solides? Il n’y a pas si longtemps, Swisscom subissait un vol de données qui touchait 800 000 clients; qu’adviendrait-il si c’étaient nos données médicales ou bancaires qui étaient touchées?

Pour prévenir ce type de mésaventure généralisée, une révision intégrale de la loi sur la protection des données (LPD) est en cours de discussion. Le Conseil fédéral souhaite par ce biais «mieux protéger les citoyens». Il s’agira surtout de nous aligner sur les normes de nos voisins, afin que l’Union européenne continue à reconnaître les standards helvétiques en la matière.

Mais la modernisation de la LPD traîne des pieds; elle est passée par moult retouches, a été scindée en deux pour gagner du temps sur les dispositions les plus importantes… La droite la trouve «trop compliquée». La gauche craint que le résultat ne soit bien en deçà des exigences européennes. Au vu des enjeux, cette loi – dans une mouture aussi protectrice que possible – devrait être une priorité absolue. Les tergiversations du parlement démontrent malheureusement combien ce sujet est laissé pour compte.

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