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Le futur procureur général de l’Etat d’Israël? Petit recueil d’immondices

AU PIED DU MUR

Comme c’est le cas dans beaucoup d’autres pays, le procureur général a un grand pouvoir au sein du système juridique israélien: c’est lui qui décide s’il faut ou non ouvrir une procédure et, le cas échéant, poursuivre ceux qui sont mis en examen. Le mandat du procureur en place, Shai Nitzan, touche a sa fin, et on peut imaginer les tractations plus ou moins secrètes concernant l’identité de celui qui va lui succéder. D’autant que quatre procédures judiciaires sont en cours contre le Premier ministre pour corruption, trafic d’influence et malversation.

Pour échapper à la prison, Benjamin Netanyahou est prêt a tout, y compris casser des institutions comme la Cour suprême, dont le gouvernement actuel envisage de retirer une partie importante des prérogatives constitutionnelles. Par ailleurs, la directrice générale du Ministère de la justice, Ami Palmor, vient d’être limogée parce qu’insuffisamment ­docile.

Le quotidien Haaretz a récemment eu vent d’une rencontre entre le ministre de la Justice Amir Ohana et l’avocat Yoram Sheftel, et de l’éventuelle nomination de ce dernier au poste de procureur général. Un portrait du personnage nous indique l’état de décomposition extrême du système tout entier. Qu’il ait défendu des «ordures» ne peut lui être reproché: c’est aussi le devoir d’un avocat que d’assister des personnages non fréquentables. Qu’il l’ait fait en défendant leurs valeurs est une autre histoire, que ce soit John (Ivan) Demjanjuk, «le boucher de Treblinka» dont il a souligné l’anticommunisme comme circonstance atténuante, ou le sergent Elor Azaria, qui a assassiné de sang-froid un jeune Palestinien blessé et désarmé.

Depuis une dizaine d’années, Sheftel a une tribune quotidienne sur une chaîne de radio très populaire au sein de la droite israélienne. Voici un petit florilège des abjections proférées par celui qui pourrait être le prochain procureur général israélien. Quand il parle des Palestiniens, il utilise le terme de «nazi-palestiniens», et les Israéliens qui soutiennent leur combat sont des collabos et de la «merde impure» (sic). Chaque fois qu’un auditeur mentionne le mot «média», Sheftel le reprend: «Je ne connais pas de journalistes en Israël, mais seulement des terroristes médiatiques».

Le procureur général et le conseiller juridique du gouvernement (nommé par Netanyahou) sont pour Sheftel «les chefs de la campagne électorale de la bande bleu et blanc (principale liste d’opposition menée par d’anciens chefs d’état-major)». Il considère le dossier 4000 (un des quatre dossiers judiciaires où le Premier ministre est accusé de corruption) comme «totalement vide, si ce n’est la volonté illimitée de faire condamner Netanyahou à n’importe quel prix».

A propos des minorités LGTB et de la Gay Pride qui devait se dérouler à Jérusalem, à laquelle Sheftel s’est grossièrement opposé: «Des foules qui se pressent sur les trottoirs et applaudissent des pédés qui défilent en bougeant leur corps d’une manière qui rappellent les cultes des populaces cananéo-païennes, quand elles sacrifiaient à Baal et Astarté.» Mais depuis un an, il fait silence sur ce sujet: son ami Amir Ohana est un homosexuel qui assume publiquement son orientation.

Interrogé par Haaretz dans le cadre d’un article qui lui était consacré, Sheftel a répondu: «Je n’ai rien à commenter sur ce qui est écrit dans les égouts antisémites»…

L’auteur est militant anticolonialiste israélien, fondateur du Centre d’information alternative (Jérusalem/Bethléem).

Opinions Chroniques Michel Warschawski

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lundi 8 janvier 2018

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