Chroniques

Le «non-deal du siècle»

AU PIED DU MUR

Le Moyen-Orient, et particulièrement la Palestine, ont connu au cours des cinquante dernières années un nombre impressionnant de «plans de paix» mis en avant par les acteurs principaux de la communauté internationale (plan Jarring, plan Rogers, Madrid, Oslo I et II, etc.). Tous se sont soldés par des échecs patents.

Donald Trump vient d’y ajouter, avec la modestie qu’on lui connaît, son «deal du siècle». Du pur trumpisme. Faisant fi de l’expérience accumulée au cours du dernier demi-siècle, ignorant grossièrement les revendications consensuelles des Palestiniens, passant outre les innombrables résolutions des Nations Unies, l’ovni de la Maison-Blanche veut réduire la solution à la question palestinienne à une affaire de gros sous. Typique d’un homme d’affaires qui croit que tout peut être acheté et que le droit et la volonté de justice peuvent être balayés par un chèque bancaire.

Parallèlement, et pour la première fois dans l’histoire de la diplomatie étasunienne au Proche-Orient, l’administration Trump défend l’annexion par Israël des territoires palestiniens occupés en 1967. L’envoyé spécial de Trump dans la région, Jason Greenblatt, et l’ambassadeur des Etats-Unis à Jérusalem (sic), David Friedman, ont répété cette semaine qu’Israël avait le droit d’annexer des parties de la Cisjordanie. Quel droit? Le droit international considère une telle annexion comme un crime contre l’humanité. La Convention universelle des droits de l’homme tout autant. En fait, il s’agit du droit du plus fort – la loi de la jungle.

Avec de tels présupposés, il est évident qu’il n’y aura aucun deal mais, au contraire, un regain de colère légitime chez les Palestiniens, y compris les plus modérés. Benyamin Netanyahou, par contre, se frotte les mains. Pour remercier «mon ami le président Trump», le premier ministre israélien vient de baptiser une nouvelle colonie sur le plateau du Golan syrien du nom du président étasunien. Si Trump a exprimé sa fierté devant le geste israélien, c’est qu’il ne comprend vraiment rien de la réalité politique au Moyen-Orient et en Palestine. Avec des conseillers comme Greenblatt et Friedman, qui sont en fait les porte-parole de la droite israélienne, il y a peu de chances qu’il améliore sa copie.

C’est cet aveuglement politique extrême qui explique comment le président étasunien peut croire qu’il a la possibilité d’acheter les Palestiniens avec quelques millions de dollars. C’est aussi sa connaissance extrêmement limitée de l’histoire, de ce qui mobilise les peuples et motive leurs actions collectives qui lui fait pondre son «deal du siècle». N’importe quel novice en politique internationale pourrait lui faire remarquer que ce «deal» ne satisfait pas le minimum du minimum de ce qui pourrait convaincre les Palestiniens à le prendre en considération. Il ira rejoindre tous les plans de paix précédents dans les poubelles de l’histoire.

L’auteur est militant anticolonialiste israélien, fondateur du Centre d’information alternative (Jérusalem/Bethléem).

Opinions Chroniques Michel Warschawski

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lundi 8 janvier 2018

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