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Fin de campagne, Netanyahou se lâche

AU PIED DU MUR

La campagne des législatives israéliennes du 9 avril est entrée dans sa dernière ligne droite. Pour être précis, disons qu’elle fait son dernier plongeon dans la fosse pestilentielle que Benjamin Netanyahou n’a cessé de creuser et d’alimenter de déclarations nauséabondes et souvent mensongères. Même si les sondages le donnent encore comme favori, le candidat premier ministre commence à transpirer face aux progrès de la liste des généraux coalisés contre le Likoud. Tous les coups sont donc permis pour celui qui considère que le pouvoir lui appartient – à lui, à sa femme et à son voyou de fils [l’aîné, Yair Netanyahou, connu pour ses frasques et ses propos antimusulmans].

Dans sa campagne, Netanyahou a même inventé un nouveau concept, celui de «putsch par les urnes»: si une majorité des électeurs votent contre lui et sa coalition d’extrême droite, il considérera cela comme un coup d’Etat, ce qui peut laisser entendre qu’il envisage de ne pas respecter les résultats du scrutin. En attendant, Netanyahou et sa garde rapprochée font feu de tout bois: ils accusent Benny Gantz, tête de la liste centriste «Bleu et blanc» et ancien chef d’état-major de l’armée israélienne, d’être manipulé par l’Iran! Pour se garantir une future majorité parlementaire, il va jusqu’à signer un accord politique avec le parti fasciste «Puissance juive» (sic), l’ex-Ligue de défense juive, interdite en Israël et dans plusieurs pays pour son idéologie raciste et ses pratiques violentes.

Mais une fois de plus, c’est contre la minorité arabe qu’il se lâche. S’étant déjà distingué lors des dernières élections par de fracassantes déclarations – «Attention, les Arabes viennent voter en masse, dans des bus affrétés par les organisations des droits de l’homme» –, le voilà qui récidive: Netanyahou accuse Gantz de préparer une majorité de blocage avec les partis arabes – que Dieu nous en préserve!

Il est à déplorer que, face à cette attaque raciste émise par un premier ministre encore en place, l’ancien chef d’état-major n’ait pas eu de riposte à la hauteur, préférant contre-attaquer sur un tout autre sujet: le dossier 3000, dans lequel Netanyahou est accusé d’avoir empoché (ou fait bénéficier son cousin) des millions d’euros de commission dans l’achat de sous-marins allemands. C’est une fois de plus le président de l’Etat, Reuven Rivlin, qui a dû remonter les bretelles au premier ministre et lui rappeler ce qu’est une démocratie: «Israël est un Etat juif et démocratique, au plein sens du terme, c’est-à-dire dans lequel il n’y a pas des citoyens de première classe et des électeurs de seconde classe. Face aux urnes, nous serons tous égaux, Juifs et Arabes.»

Le silence de Gantz est non seulement éthiquement scandaleux, mais politiquement stupide. Comme le relève l’éditorial du quotidien Haaretz (13 mars 2019), «tant que ses adversaires politiques auront peur de présenter une alternance dans laquelle les partis arabes auront toute leur place, ils ne seront pas seulement condamnés à rester dans l’opposition mais, en plus, ils le mériteront».

L’auteur est militant anticolonialiste israélien, fondateur du Centre d’information alternative (Jérusalem/Bethléem).

Opinions Chroniques Michel Warschawski

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