Édito

Cynisme désinhibé

Cynisme désinhibé
Le président français Emmanuel Macron. KEYSTONE/EPA/SASCHA STEINBACH
France

Emmanuel Macron semble pressé de faire sienne la politique de la droite dite décomplexée chère à Nicolas Sarkozy. Mercredi, il a fait diffuser de manière ostentatoire par son équipe de communicants une vidéo éclairante où il prépare son discours sur l’aide sociale. Un concentré de cynisme où le président pérore sur ces aides «qui coûtent un pognon de dingue» sans résoudre la pauvreté. Et qui s’inscrit dans la continuité de ses déclarations sur les salariés illettrés et les costards qu’il faut pouvoir se payer où le locataire de l’Elysée fait montre d’une arrogance de classe nauséabonde. Mais tellement révélatrice.

On pourrait se dire que le le président veut réformer le système d’aide sociale pour améliorer les politiques de réinsertion. Rêvons un peu. Mais pas trop longtemps. Selon Le Canard enchaîné, ce sont 7 milliards d’euros qu’il est prévu purement et simplement de couper dans ce budget. Le premier ministre, Edouard Philippe, a tenté de démentir. Mais l’hebdomadaire satirique paraissant le mercredi est généralement bien informé…

Parallèlement à ces coupes, le président des riches prévoit de supprimer l’Exit Tax, ce mécanisme visant à freiner un tant soit peu la propension des Français les plus nantis à aller planquer leur fortune dans des paradis fiscaux. Avec à la clef, un manque gagner de 6 milliards d’euros pour les caisses de l’Etat.

Dam. Faire financer les cadeaux fiscaux faits aux nantis en étranglant encore plus les milieux les plus modestes, il fallait oser. Emmanuel Macron n’est pas étouffé par la pudeur. Il a entamé une fuite en avant, privatise à tour de bras – il prévoit la vente de ADP (aéroport de Paris), d’Engie (ex-GDF Suez) et de la Française des jeux pour un montant de 15 milliards d’euros! – et à ceux qui tentent de résister, il fait donner la maréchaussée comme à Notre-Dames-des-Landes ou durant les manifs de cheminots.

Cette dérive autoritaire doit inquiéter. Le capitalisme dans une opération d’enfumage idéologique laisse accroire qu’il est le garant des libertés; on voit plutôt qu’il est capable de faire donner la pleine puissance de l’Etat pour défendre les intérêts de quelques-uns au détriment des plus défavorisés.

En cela les sorties désinhibées d’Emmanuel Macron ont au moins un mérite: elles procèdent d’une logique du dévoilement génératrice d’indignation, voire de révolte, sur laquelle il sera possible de bâtir une stratégie de reconquête idéologique et politique du pouvoir au profit du bien commun.

Opinions International Édito Philippe Bach France

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