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L’opposition n’est pas que de droite

Dan Gallin réagit à notre traitement rédactionnel sur la situation au Venezuela.
Élections

S’agissant du Venezuela (plusieurs articles récents du Courrier), il importe de tenir compte de plusieurs considérations généralement absentes des comptes-rendus, notamment:

1. Le fait qu’un gouvernement ou un parti s’auto-proclame comme «socialiste» n’est pas une condition suffisante pour le reconnaître comme tel. Nous le savons en tout cas depuis Staline.

2. L’opposition n’est pas que de droite. On peut évidemment classer l’Action Démocratique (parti social-démocrate de masse) à droite, dire que le journal Tal Cual de Teodor Petkoff est de droite, prétendre que les anarchistes et certains groupes trotskistes, opposés au chavisme dès le début, ont passé «objectivement» à droite, ensemble avec la majorité des syndicats, y compris une partie des syndicats chavistes créés par le PSUV. Ceci revient à dire que tout ce qui s’oppose au gouvernement actuel est de droite, du fait même de son opposition. Cela n’a aucun rapport avec la réalité.

3. Quand un pays a un parlement, et que des élections démocratiques à ce parlement donnent une majorité qui ne convient pas au gouvernement, et que ce gouvernement décide ensuite de créer un autre parlement où des élections manipulées lui donneraient une majorité, cela fait penser au petit poème de Bertold Brecht lors du soulèvement anti-régime dans la RDA de juin 1953, qui dit à peu près cela: le gouvernement déclare que le peuple a perdu la confiance du gouvernement, un porte-parole du gouvernement a déclaré que le peuple doit maintenant travailler dur pour regagner sa confiance, ne serait-il pas plus simple d’élire un autre peuple?

Je pense qu’il est temps que la gauche démocratique notamment, dans ses expressions radicales et tiers-mondistes, cesse d’être l’otage d’escrocs politiques, pas seulement au Venezuela, dans une vision du monde où l’impérialisme ne saurait être qu’américain, où l’anti-yanquisme tient lieu d’analyse politique et où la notion de socialisme est parfaitement compatible avec un régime autoritaire et répressif.

Dan Gallin, Carouge (GE)

Réponse de la rédaction

1. Nous reconnaissons volontiers qu’il ne suffit pas qu’un parti s’appelle socialiste pour qu’il en respecte l’appellation. Les formations membres de l’Internationale socialiste, que vous connaissez bien, nous le rappellent régulièrement. Est-ce pour autant le rôle d’un média de les rebaptiser?

2. Le Courrier a plusieurs fois donné la parole aux opposants de gauche au gouvernement («Le «madurisme» attaqué de l’intérieur» le 21 juillet, ou encore «Le Venezuela pourra-t-il se relever?» en 2015). Cela dit, ce courant demeure très marginal en comparaison avec les principales composantes de la coalition Mesa de la Unidad Democratica (MUD), Primero Justicia et Voluntad Popular (droite) et COPEI (centre droite). Quant à AD (même additionnée à ses alliés d’UNT), elle ne pesait en 2015 qu’un 1/5 des voix de la MUD. Et, comme vous le suggérez vous-même, il ne suffit pas à la formation de feu Carlos Andres Perez d’être affiliée à l’Internationale socialiste pour être réellement de gauche.

3. Le Courrier n’est l’otage de personne. Il tente d’apporter un éclairage indépendant et critique sur l’ensemble des expériences progressistes. Une ligne constante, également sur le Venezuela, dont témoignent nos éditoriaux et nos analyses signés par diverses plumes et consultables sur notre site. BPZ

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