Édito

Les belles leçons

Économie

Notre ministre de l’Economie, de la formation et de la recherche aime à le rappeler: le marché suisse de l’emploi se porte bien, très bien même, en comparaison avec nos voisins européens. Fort de son expérience de chef d’entreprise à la tête du groupe Ammann, il sait ce qui est bon ou non pour la santé d’une entreprise – et donc des employés. Son ancienne fonction ressort souvent dans ses discussions avec la presse, comme un gage de crédibilité.

Alors quand ledit groupe, dirigé par le fils de Johann Schneider-Ammann, annonce la suppression de 130 postes sur 416 (notre édition de mercredi), avec des délocalisations en Allemagne ou en Italie, la leçon sur les vertus du libre-échange passe difficilement. La réalité, c’est que notre économie est dirigée par un chantre de l’ultralibéralisme et de l’optimisation fiscale (en 2014, la presse révélait que le groupe Ammann avait fait échapper 260 millions au fisc). Et que l’industrie des machines, dans laquelle il a forgé son expérience et sa fortune, est en train de sombrer sans que notre grand timonier ne sache trop quoi y faire.

Un constat qui n’empêche pas le ministre de vanter les mérites de notre économie à l’étranger. «A chaque fois que je rencontre un interlocuteur français, j’aborde la question des contraintes et du manque de flexibilité du droit français», expliquait-il au Temps le 8 mai dernier. C’est le mythe de la flexibilisation de l’emploi comme moteur économique. Faciliter les licenciements encouragerait l’embauche. Des théories démontées par des spécialistes comme le statisticien Michel Husson, membre des «économistes atterrés».

La Suissepeut certes se vanter d’un faible taux de chômage en comparaison internationale. Mais ne fanfaronnons pas: les ouvriers, les petits paysans ou les seniors craignant pour leur emploi font quotidiennement l’expérience d’une réalité moins reluisante. Celle d’une Suisse fascinée par les multinationales, start-up et autres spin-off, dont ils sont les laissés-pour-compte. Et pour eux, à l’heure actuelle, Berne n’a aucune solution à offrir.

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