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Soro Solo, flamboyant ambassadeur du continent africain

EST-CE BIEN RAISONNABLE?

Le journaliste ivoirien Soro Solo a contribué à changer l’image du continent africain et est devenu l’un de ses meilleurs ambassadeurs, en France, mais aussi en Suisse, grâce à son émission L’Afrique enchantée, chaque dimanche sur France Inter, aux côtés de son complice Vladimir Cagnolari. Il poursuit désormais seul l’aventure avec L’Afrique en solo; et toujours une moyenne de quelque 350 000 auditeurs.

Une véritable saga, pleine de rebondissements, pour celui qui fut d’abord un journaliste vedette dans son pays d’origine, la Côte d’Ivoire. Petit retour en arrière. Nous sommes à la fin des années 1980, le vent de la démocratisation souffle sur l’Afrique de l’Ouest. Celui qui s’appelle encore Coulibaly Souleymane – avant de reprendre son patronyme sénoufo «Soro» – anime La Matinale sur les ondes de la radio nationale. Il lance alors une nouvelle chronique, «le Grognon», qui permet aux auditeurs de «grogner» un peu en direct, de partager leur colère, lorsque, par exemple ils se font racketter par un représentant des forces de l’ordre. Un ton et une liberté inhabituels, qui marqueront les esprits, et feront aussi grincer quelques dents: les suspensions d’antenne se multiplient pour le journaliste, qui voit un jour des soldats débarquer dans le studio.

Durant les années de crise qu’a traversées la Côte d’Ivoire, les personnes originaires du nord du pays, comme Soro Solo, sont particulièrement menacées. En octobre 2002, lors de l’enterrement d’un membre de sa famille, deux de ses cousins portant le même patronyme que lui sont abattus par un «escadron de la mort»; lui-même sauve sa peau de justesse. Sa famille, ses amis, le supplient alors de se mettre à l’abri. En janvier 2003, alors qu’il séjourne à Paris, Soro Solo demande et obtient l’asile politique en France.

Comme pour tous les exilés, les débuts furent difficiles. Et ils sont nombreux, à Paris, les journalistes africains qui tentent de se (re)faire une place au soleil. Il fait des piges pour des magazines, décroche une chronique sur Radio France internationale. Mais c’est l’aventure de L’Afrique enchantée sur les ondes de France Inter qui le propulsera sur le devant de la scène; et lui permettra de s’épanouir professionnellement, avant d’être récompensé par le Grand Prix des radios francophones publiques en 2009.

Soro Solo, en compagnie de son ami Vladimir Cagnolari, journaliste lui aussi, part des musiques du continent pour raconter l’Afrique, sous toutes ses facettes, diffuse des chansons mythiques pour incarner un pays, un thème, souvent en lien avec l’actualité – et tordre au passage le cou à une image parfois dévalorisée du continent africain. Solo et Vlad se donnent la réplique, se transforment en griots pour conter cette Afrique si chère à leur cœur: «Vladimir et moi avons les mêmes envies de radio: nous nous intéressons plus aux sans-voix qu’aux officiels, qui sont tout le temps devant des micros et des caméras», explique-t-il en souriant.

Le succès de L’Afrique enchantée est tel que les deux amis décident de partir à la rencontre de leurs auditeurs, et se lancent dans l’organisation des «Bals de l’Afrique enchantée», aux quatre coins de la France. Ces répliques des bals populaires version tropicale proposent un répertoire des années 1960 à aujourd’hui. Entre les morceaux, Solo, de sa voix rocailleuse reconnaissable entre toutes, dreadlocks au vent, balance une anecdote au micro, explique le contexte social ou politique du morceau, et enchante son public.

Les organisateurs de festivals se l’arrachent, en France, mais aussi ailleurs dans le monde. Son press-book est impressionnant: les plus grands médias lui ont consacré des émissions ou des articles terriblement élogieux. Son complice, Vladimir Cagnolari, ayant décidé de relever d’autres défis, c’est seul aux commandes qu’il anime désormais L’Afrique en solo, chaque dimanche soir sur France Inter, de 22h à 2 h. Sur le même principe et avec le même succès.

 

*Journaliste, SWISSAID (l’opinion exprimée ne reflète pas nécessairement celle de SWISSAID).

Opinions Chroniques Catherine Morand

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lundi 8 janvier 2018

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