«Une définition du mariage teintée de culture religieuse n’a aucun sens»
La votation fédérale du 28 février dite «Pour le couple et la famille – Non à la pénalisation du mariage» a un caractère particulier, elle est malhonnête. Relier la question fiscale à la question du mariage empêche d’emblée de se poser les deux questions qui émanent de ce texte, à savoir: est-ce que je souhaite que les couples mariés ne paient pas davantage d’impôt fédéral que les célibataires? Et est-ce que je veux réserver le mariage civil à l’union entre un homme et une femme, exclusivement?
Il y a une réponse technique toute simple à la première question, le splitting intégral, que le canton de Genève a mis en œuvre dans une réforme fiscale entrée en vigueur en 2009. On additionne le revenu des conjoints, on le divise par deux, on prend le taux d’imposition équivalent et le tour est joué! Aucun besoin de passer par la redéfinition du mariage pour résoudre le problème de l’imposition défavorable des couples mariés comparativement aux célibataires.
Quant à la deuxième question, elle n’a rien d’un «point de détail», contrairement à ce qu’a affirmé le président du PDC. C’est au contraire une vraie question de société. Certains pensent qu’il est mieux d’avoir un régime spécifique pour les personnes homosexuelles, d’où l’existence du partenariat enregistré depuis 2005 en Suisse. D’autres pensent encore qu’on devrait plutôt ouvrir le mariage civil aux personnes homosexuelles, comme l’ont fait les Pays-Bas il y a quinze ans, puis dix-neuf autres pays dans le monde depuis, légalisant de même l’adoption.
En ce qui me concerne, mon choix est fait, je voterai non le 28 février. Le mariage civil est une institution laïque. Qu’il soit motivé pour des raisons administratives, financières ou affectives, peu m’importe. C’est un contrat entre deux personnes qui désirent partager durablement leur destin (avoir des enfants, une entreprise ou un patrimoine en commun). Revenir à une définition du mariage teintée de culture religieuse n’a aucun sens.
La démocratie doit être garante de l’égalité devant la loi, quelle que soit l’orientation sexuelle du citoyen. Attelons-nous à ouvrir le partenariat enregistré à l’adoption, voire à abolir le partenariat et permettre aux personnes homosexuelles de se marier, plutôt que de créer de nouvelles inégalités. Laissons aussi la vision religieuse du mariage à sa juste place, dans les églises. Rappelez-moi, on est bien au XXIe siècle, n’est-ce pas?
* Directrice de Dialogai, Genève.