Édito

Pseudo orthodoxie budgétaire

Fiscalité

La nouvelle – discrétion toute protestante au bout du lac oblige? – a été annoncée samedi par la Tribune de Genève avec une retenue certaine. Quelque 120 millions de francs sont tombés tout cuits du ciel dans l’escarcelle fiscale de la petite mais rutilante commune genevoise d’Anières. Le canton devrait pour sa part empocher 400 millions. Le Département des finances se refuse à confirmer la part de la Confédération (mais cela devrait aussi se chiffrer en centaines de millions).

Impossible de connaître la raison de ce soudain versement. Décès d’un très riche contribuable imposé au forfait (dans ce cas, les successions sont imposées, ce qui mettrait sa fortune à quelque 6,7 milliards si cet héritage est transmis en ligne directe); banquier privé impacté par les changements de raison sociale en cours dans la branche; société qui sort d’une période d’allègement fiscal; ou vente d’un parc immobilier substantiel?

Tout cela montre surtout que Genève est loin d’être l’enfer fiscal décrit, des trémolos dans la voix, par les milieux bourgeois et leurs fidèles spadassins au parlement cantonal.

Il y a beaucoup d’argent dans les mains de quelques très grosses fortunes. Il serait intéressant de refaire dans quelques années les calculs qui avaient servi de base au débat politique lors de la dernière baisse d’impôts en 2009. Le fameux bouclier fiscal qui avait été mis en place pourrait bien avoir un coût plus important qu’annoncé alors (on parlait de 40 millions à 60 millions de manque à gagner).

La deuxième leçon à tirer de cet épisode est politique. Les députés genevois se sont écharpés deux jours durant en décembre pour mettre sous toit un budget cantonal. Avec un écart de 12 millions entre le début et la fin des débats, soit une feuille de papier en regard de 7,8 milliards que pèse ce document. Ceci au prix de coupes antisociales proprement scandaleuses. A l’arrivée, les comptes afficheront un boni de 400 millions. Les pauvres, qui ont été mis au pain sec, apprécieront.

La moindre des choses serait d’annuler ces coupes. Bonne nouvelle: le peuple votera, puisque l’Avivo et l’Asloca ont lancé trois référendums.

Espérons que ces 400 millions lui donneront le courage de mettre fin à cette politique hypocrite qui impose une lutte des classes à l’envers sous prétexte d’une pseudo orthodoxie budgétaire.

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