L’école porteuse d’espoir pour la famille Che
La vie passe lentement à Gancho Caoba, un village dans les montagnes au Nord du Guatemala. Lentement, mais pas facilement. Si le ciel ne livre pas une pluie généreuse, la faim viendra, et si un villageois tombe malade, il sera nécessaire de collecter des plantes médicinales et de les préparer parce que l’hôpital est loin. La famille Che vit là-bas, avec ses sept enfants – une vie ardue, surtout depuis la crise financière.
Roberto, le père, se lève avant le soleil et se met au travail dans un minuscule champ de maïs et de haricots. Il admire les tiges qui poussent peu à peu jusqu’à vouloir toucher le ciel selon lui. Lorsque la récolte sera prête, il la conservera dans des sacs et attendra la visite de Coyote, l’homme qui va de village en village pour acheter le maïs.
Coyote arrive enfin, avec son visage bourru et ses poches pleines d’argent, et l’espoir des pères de famille est à son comble. Dans leur imagination, ils ont déjà dépensé l’argent gagné dans de nouvelles chaussures et des vêtements pour leurs enfants. Mais Coyote n’a pas toujours de bonnes nouvelles. En 2009, quand la crise financière a frappé le monde, il est venu avec un nouveau prix: 80 quetzals, un peu moins de dix dollars par quintal.
Roberto avait froncé les sourcils et essayé de négocier un meilleur prix. L’année précédente, il avait vendu le sac à 125 quetzals! Comment était-il possible que Coyote lui offre tellement moins? Mais la négociation n’est pas très utile, Coyote partira tranquillement si Roberto ne veut pas vendre, sachant que le prochain village sera tellement désespéré qu’il achètera le maïs pour le même prix, voire moins.
Gancho Caoba est peuplé de vingt familles, à quatre heures de route de Cobán, la ville la plus proche. Ils sont ainsi éloignés de l’hôpital, des commerces et des différents services publics. Roberto et sa famille vivent avec vingt quetzals, environ trois dollars par jour. Avec cet argent, les sept enfants et les parents doivent se nourrir, se vêtir et s’éduquer. Roberto n’est ainsi pas allé à l’école, il sait à peine lire et écrire et sa femme n’a même pas appris l’espagnol, la langue nationale et notamment celle de l’administration.
Lorsque Roberto pense à la vie de ses parents et de ses grands-parents, il ne la trouve pas très différente de la sienne. Mais quand il pense à l’avenir, son visage change d’expression. Ses sept enfants vont maintenant à l’école. L’aîné, dix-huit ans, sera diplômé et deviendra enseignant très bientôt. L’avenir se décline sous forme d’écoles – l’école primaire de l’organisation locale Xch’ool Ixim, soutenue financièrement par Enfants du Monde (lire ci-contre), l’école secondaire qui sera prochainement mise en place, l’école de formation professionnelle à laquelle ils pourront accéder.
L’école, l’éducation, est devenue l’espoir de tous. Dans les salles de classe de Xch’ool Ixim, une éducation bilingue et interculturelle est proposée, d’une qualité bien meilleure que celle des écoles publiques. Convaincu par l’utilité et la bonne qualité de cette forme d’éducation, le Ministère de l’Education prend maintenant en charge ces écoles et a même demandé à Xch’ool Ixim et à Enfants du Monde d’introduire ce modèle éducatif dans quarante-cinq écoles publiques, à ses frais, en vue d’une extension ultérieure plus importante.
Roberto voit ses enfants courir à l’école et en revenir chaque jour avec de nouvelles connaissances, qui plus est utiles et adaptées à leur milieu. En les voyant, il pense à l’un des enfants de Peña Blanca, un village voisin, qui, grâce à la formation facilitée par Xch’ool Ixim, a obtenu une bourse pour étudier dans une université américaine. Un frisson d’excitation secoue son corps et son esprit. Ses enfants vont grandir plus haut que le maïs, ils vont vraiment toucher le ciel.
MARTA SANDOVAL