Contrechamp

Tout est bon pour balayer les petits paysans

La monoculture industrielle, fortement dépendante des hydrocarbures pour la mécanisation, les engrais chimiques, les produits phytosanitaires et les transports jusqu’aux marchés éloignés, est une des sources principales de gaz à effet de serre. L’agriculture paysanne, qui n’en produit qu’une fraction – et qui, selon les recherches de l’Organisation pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), produit plus d’aliments à l’hectare que l’agriculture industrielle – devrait logiquement être une priorité. Pourtant tous les moyens sont bons pour en finir avec les petits paysans: accords de «libre» échange à l’OMC et ailleurs, subventions à l’agro-industrie et, dans bien des pays, la violence armée.

Ainsi, plus de la moitié des terres arables de l’Argentine, du Paraguay et de l’Uruguay, ainsi que d’énormes étendues au Brésil et en Bolivie, sont déjà plantées en soja, presque entièrement de la variété OGM de Monsanto. C’est la matière première des usines à viande et à lait du Nord. Cela provoque une déforestation massive et l’expulsion de paysans par centaines de milliers. Ainsi, mille hectares de soja transgénique se cultivent aujourd’hui avec deux ouvriers. Là où pouvaient vivre auparavant des centaines de familles paysannes.

Mais le pire est peut-être à venir! Au nom de la lutte contre l’effet de serre, ce processus risque de se démultiplier. En effet, les quotas obligatoires de soi-disant «biocarburants» fixés au Nord créent une demande énorme. De plus, cerise sur le gâteau de Monsanto, les cultures de soja OGM sont en passe d’être reconnues comme un «mécanisme de développement propre» (MDP), gagnant des crédits qui se monnaient sur les marchés de carbone!

Et quid des déforestations désastreuses pour le climat –l la déforestation est responsable pour 18% des gaz à effet de serre – que ces cultures engendrent en Amazonie, en Colombie, en Indonésie et ailleurs? Les agro-industriels, avec l’aval complice du WWF International, ont déjà la réponse: Des «tables rondes» pour le soja, la canne à sucre ou la palme africaine «responsables»! Les produits ainsi certifiés seraient censés ne pas provenir de terres récemment défrichées. Cette certification est parfaitement hypocrite car, évidemment, des cultures semées par millions d’hectares ne peuvent que provoquer un effet de vases communicants. Même si elles-mêmes se font sans déforestation, les activités qu’elles déplacent – cultures vivrières, élevage, etc. – en provoqueront forcément.

Enfin, ce désastre environnemental et social sans précédent ne pourrait de toute façon pas apporter une réponse sérieuse au problème énergétique. Des continents entiers plantés en agrocarburants ne suffiraient pas à remplacer notre consommation immodérée d’énergies fossiles. OMC/CJS

Opinions Contrechamp Olivier De Marcellus

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