Le Pacs suisse, une discrimination stratégique
La loi sur le partenariat enregistré (LPart) est entrée en vigueur en janvier 2007. Le professeur ordinaire Andreas R. Ziegler, au Centre de droit public de l’UNIL, a participé à l’écriture d’un ouvrage détaillant les enjeux de ce nouveau contrat. Entretien.
La LPart témoigne-t-elle d’une politique de tolérance vis-à-vis de l’homosexualité?
Cette loi fait preuve de tolérance car elle donne une base légale à la vie en couple des gays et lesbiennes. Mais elle ne va pas jusqu’au bout. Réserver le mariage à un homme et une femme montre qu’il existe encore des réticences à ouvrir ce contrat à tous les couples. Pour un juriste, le mariage est plus logique, car il permet d’éviter toute discrimination.
Pourquoi ne pas avoir fait voter directement en 2005 le droit au mariage des couples homosexuels?
Lors de la discussion de cette loi, il a été décidé stratégiquement de ne pas mettre l’adoption en jeu pour ne pas la surcharger lors du référendum. On voulait surtout faire passer l’idée de contrat. De plus, le mot «mariage» aurait pu rencontrer des refus, car c’est un concept encore imprégné par la religion.
Une fois contracté, le partenariat enregistré rend l’homosexualité d’une personne notoire auprès de son employeur. On parle alors de «coming out administratif». Quelles sont les autres failles de cette loi?
Si une personne étrangère est liée en Suisse par un partenariat enregistré, ce statut sera inscrit sur son visa. Ceci peut poser problème si cette personne est originaire d’un pays dans lequel l’homosexualité est condamnée.
La LPart refuse le droit à l’adoption et à la procréation assistée. La Suisse devra-t-elle un jour franchir le pas?
En Espagne, le mariage et l’adoption sont entrés en vigueur le 3 juillet 2005. Nous nous sommes donc peut-être trompés en mettant cette restriction dans la loi. Il est clair que si nous en restons là, nous serons un jour en minorité par rapport à d’autres pays démocratiques. La situation est comparable à la législation autour des familles recomposées: le droit doit s’adapter aux changements des moeurs. Actuellement, une majorité de Suisses n’acceptent pas encore que des familles autres que celles du schéma traditionnel puissent être bonnes pour un enfant. Il faut donc engager un débat à ce sujet. S.P.
Andreas R. Ziegler, Nadja Herz, Martin Bertschi, Michel Montini, Alexandre Curchod, Droits des gays et lesbiennes en Suisse, Editions Staempfli, Berne, 2006.
Andreas R. Ziegler, Nadja Herz, Martin Bertschi, Michel Montini, Alexandre Curchod, Droits des gays et lesbiennes en Suisse, Editions Staempfli, Berne, 2006.