Chroniques

2: Le prix de l’information

A l’heure où chaque média doit réinventer son modèle économique, et où le monde politico-industriel cherche des solutions pour aider la presse, il nous a paru important de partager avec nos lectrices et lecteurs notre propre perception de ces enjeux.
L'information a un coût

L’accord semble général sur l’importance de l’information pour la démocratie. Du décryptage des enjeux des prochaines votations à l’analyse des grands flux qui façonnent nos sociétés, l’information permet de mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons. Elle peut servir à faire évoluer les comportements sociaux et individuels sur la base d’un savoir acquis et d’une prise de conscience.

Attention: influencer les comportements, c’est aussi l’objectif des publicitaires et des propagandistes de tous bords. Mais à d’autres fins: ils visent à vendre un produit ou à convaincre d’une position politique. Nous quittons là le domaine de l’information pour celui de la communication.

Dès lors, il importe de rappeler le principe «qui paie commande» et de s’intéresser aux sources de financement des journaux dits d’information. Qui en est le payeur? Cette question-boussole permet de s’orienter sur l’axe allant des journaux gratuits – financés uniquement par la publicité – à ceux qui ne vivent que par leur lectorat. C’est là aussi que se joue la question de l’indépendance traitée dans notre précédent volet. Le Courrier se situe nettement du côté des journaux financés par leur lectorat, sans pour autant avoir renoncé entièrement à l’apport que représente la publicité – environ 13% de ses recettes. Ainsi, ce sont très majoritairement nos lectrices et lecteurs qui détiennent les clefs de notre survie et de notre indépendance: avec leur participation à la campagne de dons annuelle (souscription), ils-elles apportent 80% de nos recettes 1>Cf. premier article et les comptes 2018 publiés dans notre édition du 23 août 2019..

Qu’est-ce que ces lectrices et lecteurs achètent au juste? Au Courrier, nous répondons que l’information est un service, au sens économique du terme, soit «une prestation qui consiste en la mise à disposition d’une capacité technique ou intellectuelle» 2>Selon le Dictionnaire d’économie et de sciences sociales, J.-Y. Capul et al., 1993.. Concrètement, nos abonné-e-s et nos lecteurs ou lectrices occasionnel-le-s achètent ce que nos journalistes ont recherché, trié, analysé et mis en forme, selon la vision humaniste et progressiste définie dans notre charte rédactionnelle 3>Cf. lecourrier.ch/charte-redactionnelle/. Ainsi, la rémunération du travail de l’équipe représente la part la plus importante des charges du journal, soit 66% de l’ensemble des coûts.

Pour que Le Courrier soit viable – et non pas rentable –, ses coûts de production doivent être principalement couverts par les ventes, via les abonnements et la vente au numéro. Cette année 2019, les comptes du Courrier présenteront un découvert, comme les deux années précédentes. Un nouveau déficit en 2020 mettrait le journal en danger de faillite. La survie du titre nous commande donc impérativement d’appliquer une hausse des tarifs pour 2020.

Pour chaque catégorie d’abonnement (papier, web, etc.), nous avons recalculé le prix coûtant, qui doit couvrir les frais de production du journal. Ce prix sert d’étalon pour fixer les autres prix.

Dans ce calcul, il est apparu que le tarif actuel 4>Voir nos tarifs en vigueur sur lecourrier.ch/abonnements/ des abonnements numériques ne couvrait pas leurs coûts. En effet, ce tarif a été établi sur la base d’une vision – la version numérique est un sous-produit du journal papier – désormais caduque. Ce concept nécessite d’être révisé; c’est là un des effets de la digitalisation de notre société que tous les médias doivent affronter.

Actuellement, le nombre d’abonnements numériques progresse alors que celui des abonnements papier continue de chuter. A terme, les deux catégories d’abonnements compteront un nombre équivalent d’abonné-e-s. Pour que les coûts puissent être couverts, le prix des versions numériques devra être fortement augmenté. Pour 2020, l’augmentation des AboWeb et AboCombi (web illimité et édition papier le week-end) sera donc plus marquée que celle de l’AboPapier (imprimé et numérique), mais néanmoins modérée. Nous prévoyons de ventiler le «rattrapage» nécessaire des prix sur plusieurs années.

Un papillon présentant la nouvelle grille tarifaire accompagnera les factures des abonnements dont l’échéance se situe en 2020. Avec cette hausse des tarifs et une forte campagne en vue de nouveaux abonnements, nous espérons revenir aux chiffres noirs et poursuivre le développement de notre journal afin de fortifier notre dynamique de romandisation et d’indépendance toujours plus prononcée, et répondre ainsi à la demande de notre lectorat.

Nous en appelons donc à vous, lectrices et lecteurs, pour renouveler votre abonnement et participer à notre recherche de nouveaux abonné-e-s.

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Opinions Chroniques Eva Fernandez

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vendredi 6 décembre 2019

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